Women’s International Terrorist Conspiracy from Hell

W.I.T.C.H: Women’s International Terrorist Conspiracy from Hell Jo Freeman

WITCH était davantage une idée en action qu’une organisation. Fondée en 1968 par un groupe de femmes radicales à New York City qui voulaient faire du théâtre guérilla, des covens apparurent et disparurent à travers le pays, en même temps que des opportunités se présentaient pour réaliser des actions éclairs.

La première action fut un rassemblement à Wall Street le jour de Halloween, le festival religieux annuel des sorcières druidiques. Effrayé, le marché boursier a rapidement chuté. En 1969, le lendemain de la Saint Valentin, WITCH a fait irruption simultanément aux Salons du Mariage de New York City et San Francisco. « Attaquez les faiseurs de putains » ont-elles dit aux futures mariées et à leurs mères . Les tracts de WITCH déclaraient que « le mariage est une institution déshumanisante — une prostitution légale des femmes… On dit aux femmes dès leur enfance que leur seul vrai but dans la vie est de jouer le rôle de femme et de mère pour leurs héritiers mâles. On ne lui permet comme seule identité celle d’appendice de l’homme…. La cérémonie du mariage est le rituel symbolique de notre passage de la propriété du père à celle du mari. » Durant la manifestation, les sorcières chantaient « Voici les esclaves, sorties de leurs tombes. » Des souris blanches ont été lâchées à New York.

Parce qu’elles pouvaient être réalisées par un petit groupe et qu’elles étaient à la fois drôles et politiques, les actions de WITCH se sont rapidement propagées à travers le pays. Les femmes de Boston sont intervenues dans des bars. Celles de Washington DC lors de l’investiture présidentielle. Les femmes de Chicago ont réalisé des actions éclairs partout. Le 16 janvier 1969, huit étudiantes de l’Université de Chicago ont jeté un sort au président du département de sociologie qui avait récemment licencié une femme professeur populaire. Habillées de noir, le visage peint en blanc, elle lui ont dit « de prendre garde à la malédiction, à la malédiction des sorcières. »

Un autre coven jeta peu après un sort à la Chicago Transit Authority devant ses locaux à Merchandise Mart pour protester contre l’augmentation des tarifs. Elles ont dansé autour d’un chaudron en chantant :

Les sorcières forment le cercle
pour maudire les causes de nos malheurs,
Nous les sorcières conspirons maintenant
pour brûler la CTA dans le feu de la liberté.

Le culot des banquiers, la ruse des politiciens,
les bajoues de Daley, le sourire des laquais,
la méfiance des administrateurs, le mensonge des créanciers
Ceux-là nous les jetons bans notre feu.

Quand les réunions ont eu lieu, les décisions prises,
quand l’augmentation est rendue publique,
nous, les gens sommes la proie
du démon, de la CTA….

Et elles étaient parties avant que la police ne puisse les expulser.

Lors de Halloween , l’année suivante (1969), la cible était le procès des dirigeants de la Nouvelle Gauche arrêtés pour complot après les manifestations qui avait perturbé la convention démocrate de 1968.

Lentement, solennellement, les sorcières ont marché en file autour du Tribunal Fédéral de Chicago, les visages peints en blanc, regardant droit devant, des capes noirs flottant autour d’elles . Elles chantaient : « Notre sœur la justice est ligotée et enchaînée. Nous maudissons le sol où elle est morte. »

L’acronyme avait plus d’importance que le nom, qui variait suivant les manifestations. Le jour de la Fête des Mères, celui-ci devint Women Interested in Toppling Consumer Holidays. Une action contre la compagnie de téléphone fut organisée par les Women Incensed at Telephone Company Harrassment.

WITCH a été à l’origine de nombreux poèmes. Les Women’s Independent Taxpayers, Consumers and Homemakers chantaient

Double, bubble, war and rubble,
When you mess with women, you’ll be in trouble.
We’re convicted of murder if abortion is planned.
Convicted of conspiracy if we fight for our rights.
And burned at the stake when we stand up to fight.

Tout comme ses actions éclairs, WITCH ne traîna pas. En 1970, c’était fini.

 

Manifeste WITCH

La Sorcière est dans toutes les femmes et dans tout.
C’est le théâtre, la révolution,
la magie, la terreur et la joie.
C’est la conscience que les sorcières et les gitans
furent les premiers combattants de la guérilla et de la résistance
contre l’oppression — l’oppression des femmes
à travers les siècles.
Les sorcières ont toujours été des femmes qui osaient être
excitantes, courageuses, agressives,
intelligentes, non conformistes, curieuses,
indépendantes, libérées sexuellement, révolutionnaires.
(Cela explique peut-être pourquoi neuf millions d’entre elles
ont été brûlées comme sorcières).

Les sorcières furent les premières personnes sympathiques
et les premières trafiquantes
Les premières à pratiquer le contrôle des naissances
et l’avortement,
les premières alchimistes
Elles ne s’inclinaient devant aucun homme,
étant les seules survivantes de la culture la plus ancienne de toutes,
celle où hommes et femmes partageaient également les tâches
dans une société véritablement coopérative
avant que la répression mortelle spirituelle, économique, sexuelle,
de la « Société Phallique, Impérialiste »
ne l’emportât et ne se mit à détruire la nature
et la vie humaine.

La Sorcière vit et rit en chaque femme
C’est la partie libre de chacune d’entre-nous,
sous les sourires timides,
la passivité devant l’absurde domination masculine,
le maquillage ou les vêtements étouffants
qu’impose notre société malade.
Il n’y a pas d’adhérentes WITCH.
Si vous êtes une femme et osez regarder en vous-même,
vous êtes une Sorcière.
Vous établissez vos propres règles.
Vous êtes libres et belles.
Vous pouvez être invisibles ou apparentes,
selon comment vous choisissez de faire connaître ou non votre sorcellerie.

Vous pouvez former votre propre assemblée de sœurs sorcières
et faire ce que voulez.
Vos cibles : tout ce qui est répressif,
dominé par l’homme, cupide, puritain, autoritaire.
Vos armes sont le théâtre, la magie, la satire, les explosions, les herbes,
la musique, les costumes, les masques, les autocollants,
la peinture, les balais les poupées vaudous, les fouets, les chandelles les clochettes toute votre magnifique imagination sans limite
Votre pouvoir vient de vous mêmes
en tant que femme,
du partage, de la discussion et de l’action
de concert avec vos sœurs.
Vous vous êtes jurées de libérer nos frères
de l’oppression et des rôles sexuels stéréotypés
et de vous libérer vous-mêmes
Vous êtes une sorcière en tant que femme
indomptée, furieuse, joyeuse et immortelle.
Vous êtes une sorcière en disant haut et fort
« Je suis une sorcière »
et en pensant à cela.

Mais les sorcières sont immortelles. Elles sont réapparues ici et là depuis. Tout dernièrement, elles étaient en tête du cortège de la manifestation parisienne du 12 septembre dernier sous la forme de Witch Bloc. Voir Witch Bloc lors de la manif du 12 septembre et Contre la loi travail, les sorcières sortent du bois

On en trouve à Paris et à Toulouse. Mais nul ne sait où et quand elles apparaissent. Et nul doute que notre époque a besoin de sorcières….

Autres documents en ligne :

W.I.T.C.H. Chicago Coven, 2015 – 2017

WITCH stages ritual to protest housing inequalities in Chicago

After Black Power, Women’s Liberation

Wicked W.I.T.C.H: The 60s Feminist Protestors Who Hexed Patriarchy

The revolution is happening in our minds Jo Freeman